La structure du roman

Les chapitres Clés

Chapitre 1 : une mise en condition

Le chapitre VIII : Silas Flannery

Graphe de navigation

Réalité ou fiction ?


 La structure du roman

Si par une nuit d’hiver un voyageur est un véritable « roman gigogne ». Outre la volonté déclarée d’écrire un roman fait de débuts,  IC vous fait voyager de façon plus subtile à travers trois histoires au fur et à mesure du livre.

Le roman que vous commencez est une aventure amoureuse, liant deux personnes qui se rencontrent dans une librairie. Cette histoire est le fil conducteur du roman, et c’est donc lui qui le conclut.

Avant la fin du roman, vous aurez également vécu une quête : la quête des livres que vous aurez à chaque fois entamé sans jamais pouvoir connaître la fin de l’histoire. Cette quête vous aura fait découvrir des univers différents, tous proches du milieu de la littérature, tels que l’université et ses professeurs, une maison d’édition et son fameux rédacteur, le Dottore Cavedagna, un écrivain dans son chalet en Suisse…Cette quête prend fin à l’avant dernier chapitre.

Votre travail de détective et le nombre de pistes dévoilées au cours de la quête, ainsi que les rebondissement dans vos aventures, vous pousseront également à mener un enquête policière qui tournera à l’espionnage, pour le compte d’un pays d’Amérique Latine.

 


Les chapitres Clés

Si chacun des débuts de romans sont amenés par le chapitre précédent, l’enchaînement des trois romans , dans l’histoire continue, est orchestré par quelques chapitres clés.

Il y a tout d’abord le chapitre I qui vous plonge dans l’aventure amoureuse, mère des autres aventures. Ce chapitre fait l’objet d’une étude détaillé à la rubrique un peu plus loin ci-dessous.

 Le chapitre V arrive ensuite comme une plaque tournante entre l’université et la maison d’édition, puis le chapitre VI vous apporte, par courrier, les pistes pour que vous puissiez commencer l’enquête sur les romans inachevés et la personne à la tête de cette machination.

Le chapitre VIII, outre l’analyse que je lui consacre un peu plus loin, vous amène au départ vers l’Amérique Latine.

Les trois histoires trouvent leur chute dans les trois dernier chapitre, comme des parenthèses fermantes. Et toutes se rejoignent pour vous faire reprendre votre rôle initial, celui du personnage à qui s’adresse IC à la page 1 (sans la préface !) en disant : « Tu vas commencer le nouveau roman d’IC, Si par une nuit d’hiver un voyageur ».

 


Chapitre 1 : une mise en condition

Je vous propose l’intégralité du chapitre un ici.

Les premières lignes du chapitre 1 de ce roman sont pour le moins surprenantes !

D’abord, parce que l’auteur vous tutoie.

Puis  tout de suite vous ressentez un certain doute. Croyant entamer un roman, vous voici entrain de lire un manuel vous expliquant les conditions favorables à une bonne lecture !

C’est ainsi qu’Italo Calvino vous aborde : en se mettant à votre place et en vous parlant comme s’il se trouvait face à vous. Parmi toutes les situations énoncées, vous êtes presque sur de retrouver la votre. Ainsi,  vous passez du monde réel, celui où vous venez de commencer ce roman, à la fiction, étant donné que ce que vous vivez est déjà écrit sur cette page.

Dès lors, on ressent un effort de la part de l’auteur pour adapter le livre à son public, comme il est nécessaire de le faire lors de la création de tous produits interactifs.

Il en vient ensuite à décrire votre façon de penser, l’esprit dans lequel vous abordez ce roman :  « Ce n’est pas que tu attendes quelque chose de particulier de ce livre particulier ». Il enchaîne en dressant dresse une liste des livres qui auraient pu retenir votre attention lorsque vous vous êtes rendu à la librairie, et s’applique aussitôt à décrire votre relation avec le livre dont vous venez de vous porter acquéreur.

Puis Calvino renouvelle son effort de proximité avec le lecteur et les situations réelles, quand il décrit plusieurs scènes vous représentant entrain d’attaquer la lecture : debout dans le bus, au volant arrêté à un feu tricolore, au travail penché au-dessus d’un dossier que vous faites semblant d’étudier. Chaque situation est d’un tel réalisme qu’il est possible à chaque lecteur d’y retrouver son propre comportement.

Il revient finalement à l’instant présent, au moment où vous venez de commencer le roman, et s’applique cette fois à décrire votre sentiment sur les quelques pages que vous venez de lire et ce que vous pouvez attendre de la suite.

Sans vous en rendre compte, vous venez de vivre votre première aventure au sein de ce roman.

A la fin de ce chapitre, il règne un sentiment de confiance entre vous et l’écrivain, tant et si bien que le comportement qu’il a décrit au fur et à mesure de ces quelques pages semble vous convenir.

Voilà donc la façon subtile par laquelle Italo Calvino vous place dans le rôle du personnage principal.

 


Le chapitre VIII : Silas Flannery

Ce chapitre est celui où entre en scène un personnage évoqué auparavant : Silas Flannery. Ecrivain Irlandais habitant un chalet en Suisse, il vous dévoile son journal personnel, écrit à la première personne.

Accusé de plagiat et de cupidité, puis désigné comme « le vieux des romans policiers […] celui qui fait des romans comme un plant de citrouilles fait des citrouilles », il nous relate  ses états d’âme d’écrivain, à travers lesquels on ressent bien sur ceux d’IC.

Il y fait notamment allusion à un projet d’écriture : une histoire liant deux écrivains concurrents et une lectrice passionnée, dont il propose plusieurs chutes.

L’écrivain philosophe ensuite sur la lecture, l’écriture, puis la condition d’un écrivain à succès.

Flannery raconte ensuite ses rencontres, d’abord avec une mauvaise lectrice, dénommée Lotaria, qui décortique ses livres à l’aide d’ordinateurs ; puis vient la sœur de cette demoiselle, Ludmilla, qui le considère comme « le modèle des écrivains », et que Flannery envisage comme pouvant être sa « lectrice idéale ». Et il en arrive à parler de la visite d’un lecteur venu le voir au sujet d’un de ses livres dont il a trouvé deux récits différents, ou plutôt deux débuts, puisqu’il n’a pu en lire respectivement que le premier chapitre !

Enfin, il parle de la façon de lire de ce lecteur qui lui a inspiré un nouveau roman : « un roman tout entier fait de débuts de romans », qu’il pourrait écrire « tout entier à la seconde personne », et dans lequel il pourrait faire intervenir « une lectrice, un traducteur faussaire, un viail écrivain qui tiendrait un journal comme celui-ci… ».

Et il résume ainsi en un paragraphe l’histoire du livre que vous tenez entre les mains !

 



Graphe de navigation

 

Aventure amoureuse
 
Chapitre 1
Si par une nuit d'hiver un voyageur
Chapitre 2
 
En s'éloignant de Malbrok
 
Chapitre 3
Penché au bord de la pente escarpée
Chapitre 4
Sans craindre le vertige et le vent
Chapitre 5
Quête de la fin
des romans
Enquête policière/
espionnage
Regarde en bas dans l'épaisseur des ombres
Chapitre 6
Dans un réseau de lignes entrelacées
Chapitre 7
Dans un réseau de lignes entrecroisées
Chapitre 8
Sur le tapis de feuilles éclairées par la lune
Chapitre 9
Autour d'une fosse vide
Chapitre 10
Quelle histoire attend là-bas sa fin ?
 
Chapitre 11
 
Chapitre 12



Réalité ou fiction ?

En vous faisant revêtire le rôle du personnage principal, IC vous emmène dans ses aventures, comme si vous étiez le héros du film que vous regardez à l’écran.

Pour parvenir à cela, IC utilise trois stratagèmes particuliers.

Le premier est le « TU » . En s’adressant à vous directement la seconde personne du singulier, IC instaure une proximité entre lui et vous, comme une certaine intimité. Cette proximité lui permet de vous faire croire qu’il vous connaît et ainsi de vous faire accepter le rôle qu’il veut vous faire jouer.

Le deuxième stratagème est la rupture. Après avoir pris contact avec vous, Lecteur, et avoir commencé son roman, vous plongeant ainsi dans la fiction des aventures relatées par le premier chapitre de Si par une nuit d’hiver un voyageur, IC sort complètement de l’histoire, revient à vous et vous interpelle : « Tu as lu déjà une trentaine de pages et voici que l’histoire commence à te passionner ». Puis il reprend votre description – « Tu es un lecteur sensible à ce genre de finesse, toi » - avant de vous replonger dans la fiction. A ce moment du livre, beaucoup ont dû être tentés, comme moi, d’aller vérifier la véracité de ce qui est écrit à la page 17 !

Il appliquera de nouveau ce stratagème au chapitre XI où cette fois il s’adresse à vous en disant : « Lecteur, il est emps que cette navigation agitée trouve enfin un point où aborder ». Et cette fois encore il prolonge la fiction pour un dernier chapitre.

Enfin, la troisième tactique est la distanciation. Alternant le récit de fiction et le roman réaliste,  IC joue avec ses personnages, avec vous. Il accorde un moment le TU au féminin, avant de vous le rendre au masculin. Et il en arrive lui-même à jouer un rôle, celui de Silas Flannery, dont il se sert comme un ventriloque de sa marionnette. Cette pirouette littéraire lui permet en plus d’ajouter un niveau d’interactivité quand cet écrivain (représentant Calvino) parle d’un lecteur (vous) à la troisième personne du singulier… un peu comme une mise en application du Kaléidoscope de Dans un réseau de lignes entrecroisées.

C’est ainsi  en vous baladant entre réalité et fiction, en jouant sur les relations qui vous unissent vous, lui et le roman, qu’IC vous fait vivre une aventure, comme vous vivez une partie de jeu de rôle ou d’un bon jeu sur ordinateur.